marion lenne

Députée de la XVème législature

podcast #59 – Rapatriement des terroristes français

Retrouvez la transcription complète du podcast ci-dessous :

Permettez-moi aujourd’hui d’évoquer avec vous, le sujet sensible du rapatriement ou non des terroristes français.
Depuis le 3 juin, 11 ressortissants français ont été condamnés à mort par la justice irakienne. Arrêtés en Syrie par les forces arabo-kurdes, ils ont été déplacés en Irak, le 25 février dernier. Notre gouvernement est opposé au rapatriement des djihadistes, la souveraineté des états primant. La ministre de la Justice, Nicole BELLOUBET, affirmait à ce moment là que Paris interviendrait si la peine de mort était prononcée, notre pays n’acceptant plus cette sentence depuis 1981. Rappelons que la situation des enfants orphelins ou isolés est la priorité du Gouvernement, et que tous les efforts sont déployés pour les ramener sur le sol français.
Dans un récent communiqué de presse, l’Association Française des Victimes du Terrorisme (AFVT) rappelle sa profonde opposition de principe à la peine de mort, qui va à l’encontre de ses valeurs démocratiques et humanistes. Les personnes ayant participé au groupe Etat Islamique doivent être jugées et condamnées, dans le respect de leurs droits fondamentaux . Aucun étranger condamné pour appartenance à Daech n’a jusqu’ici été exécuté.
De mon point de vue, le droit n’existe pas partout, et quel que soit le délit, tout être humain doit être jugé de manière équitable. Comme l’a expliqué Robert Badinter, après l’attentat de Charlie Hebdo,: «Au-delà du chagrin et de la pitié s’inscrit le devoir de justice. […]. A la justice de décider leur sort, en toute indépendance et dans le respect de l’Etat de Droit. Ce n’est pas par des lois et des juridictions d’exception qu’on défend la liberté contre ses ennemis. Ce serait là un piège que l’histoire a déjà tendu aux démocraties. Celles qui y ont cédé n’ont rien gagné en efficacité répressive, mais beaucoup perdu en termes de liberté et parfois d’honneur». Celui qui abrogea la peine de mort en 1981, lors de son hommage en 2018 au lieutenant colonel Arnaud Beltrame, tué dans l’Aude lors d’un attentat dans un supermarché dit : « Le jihadiste qui se fait exploser au milieu de ces victimes innocentes commet un acte monstrueux. Mais pour les partisans de son idéologie, il est un martyr. Assassin pour nous, martyr pour les siens : c’est pourtant du même homme et du même acte dont il s’agit». En somme, la loi du Talion ne peut pas être une solution.
Ceux qui demandent le rétablissement de la peine de mort méconnaissent les principes de notre Etat de droit. L’abolition ne relève pas seulement de la loi de 1981. Elle a été constitutionnalisée en 2007 à une très forte majorité du Congrès, à l’initiative du président JacquesCHIRAC. Par ailleurs, l’abolition est inscrite dans une série de conventions internationales dont la force juridique est supérieure à celle de la loi nationale. Sur le plan mondial, l’abolition est aussi consacrée par des protocoles de l’Organisation des Nations Unies dont la France fait partie. Cette France qui se veut patrie des droits de l’homme, ne saurait dénoncer ces engagements internationaux sans renier le message dont elle se veut toujours porteuse.
Qui plus est, la peine de mort ne peut pas être dissuasive pour des terroristes qui périssent dans un attentat, et donnent la mort à des victimes innocentes. M. Badinter le rappelle, il existe entre la mort et le terrorisme un rapport secret, une alliance névrotique.
Se pose alors la question de la radicalisation et de la sanction, qui, nous le savons, est très prolifère dans des prisons surchargées.
Que propose aujourd’hui notre gouvernement pour désamorcer cet engrenage ? En juillet dernier, le Premier ministre Edouard Philippe présentait un Plan d’Action Contre le Terrorisme (PACT), qui fait suite au Plan d’Action Contre la Radicalisation et le Terrorisme (PART). 32 actions publiques sont pensées, basées sur 4 priorités : connaître, entraver, protéger et réprimer.

L’action 6 prévoit un dispositif d’anticipation et de prise en compte par les services des sorties de ces individus, nécessaire à la prévention d’éventuelles actions à caractère terroriste. Une unité permanente sera créée au sein de l’Unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT) avec des agents du renseignement pénitentiaire. Le chemin est encore long, nous devons trouver les bons outils pour empêcher le prosélytisme, être un exemple d’intégration pour nos enfants, en travaillant au plus près des jeunes, en faisant la promotion de la culture et du respect d’autrui.

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